Dans ce second extrait de sa réponse, Cora répond directement aux présupposés de Serge. Le premier texte mettait en question l’abord de la vérité et l’intégrité intellectuelle des vues ou préconceptions évangéliques. Celui-ci en vient directement à la question : quelles personnes devons-nous être par rapport à notre prochain ? Quel regard devons-nous avoir sur chaque personne, particulièrement dans des situations d’oppression et de souffrance ? La conclusion la plus essentielle de Cora est que « Dieu n’est pas un dieu ethnique. »
Cela semble évident – mais mérite malheureusement d’être répété par les temps qui courent.
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Cher Serge, … … Ta phrase « donner les armes à l’ennemi » est un peu déplacée à mon goût et je me demande à mon tour est-ce que ce genre de réflexion est objective? Ne nous laissons pas aveugler par des à priori, des stéréotypes. L’objectivité dans la situation Israélo-palestinienne est de connaître les deux côtés et d’éviter d’avancer des arguments tout fait et remplis de préjugés sur une population que l’on n’a jamais rencontré ou essayé de comprendre. La découverte de cette vérité, de la souffrance de ce peuple ne m’a pas transformée en activiste, prête à défier corps et âme la force armée israélienne. Au contraire, cette vérité a développé en moi plus de compréhension, de discernement, de compassion. Tout cela a ouvert mon esprit sur l’éthique du chrétien définit par l’amour pour son prochain. Dieu est du côté de l’oppressé et il apporte un discours d’amour et donc de force à l’oppresseur. Ainsi, je n’ai développé aucune haine envers les israéliens en tant qu’individus (plutôt de la pitié pour l’ignorance d’un grand nombre d’entre eux) mais une aversion envers un État colonisateur. Ce qui me préoccupe le plus dans cette situation ce sont les viols des droits humains et le caractère facétieux des discours de paix. Je pense que Dieu nous appelle à être présent là où la paix et la justice sont déconsidérées, auprès de l’oppressé comme Jésus en parle dans les évangiles*.
Il est important aussi de mentionner -- et ça je l’ai appris en discutant avec des Israéliens -- que ces derniers ne connaissent pas ou peu les raisons de leur présence en Israël. La peur les assaillit, leur ignorance les rend nerveux, ils ne connaissent pas leur voisin. Pire, les livres d’histoire leur mentent. Et c’est là aussi que mon travail peut aussi avoir ses raisons d’exister, au-delà de tout différent religieux, chaque être humain a le droit de savoir, de réfléchir, d’être conscient des réalités qu’il soit Palestinien ou Israélien.
Dieu porte son attention sur chaque être humain quelque soit son origine ethnique, c’est ainsi que nous devrions aussi réagir. Est-ce que je me trompe? N’oublions pas les chrétiens d’origine arabe qui vivent aujourd’hui en Palestine et qui ont aussi été expulsés de leur village et vivent aussi sous l’occupation. Ces derniers sont-ils moins nos frères parce qu’ils sont arabes? Dieu n’est pas un dieu ethnique et notre prochain peut être juif, arabe ou tout autre, il est son enfant et Dieu nous demande de l’aimer. Le principal est de servir la vérité dans l’amour, la paix et la justice. […]
La vérité quel qu’elle soit ne devrait jamais troubler notre foi. Et la mienne veut obéir à ce commandement qui dit qu’il n’y a qu’un seul vrai Dieu et que ce dernier nous demande d’aimer notre prochain. Est-ce que Dieu me reprochera ce choix « au grand jour » dont tu parles?
Ainsi, même si les écritures nous informent de la fin des temps et de ce à quoi nous devons nous attendre, je refuse de m’abstenir de toute action parce qu’ « il est écrit » que les choses doivent se présenter d’une façon ou d’une autre. Je trouve personnellement que le pacifisme n’est pas passif. Il faut prouver notre désir de paix par une foi active. Aujourd’hui, Israël et la Palestine souffrent chacun de leur côté, l’un de la souffrance commise et l’autre de la souffrance subie.
Cette expérience israélo-palestinienne m’a particulièrement marquée dans ma foi, ma vision sur les choses et la manière de les aborder. Sur le Mur de séparation entre Israël et la Palestine, beaucoup de gens se sont exprimés avec des dessins ou des messages, il y en a un que je viens juste de découvrir et que je trouve très juste, il dit : « God is good not only for the Jews but for everyone » (Dieu est bon, pas seulement pour les Juifs mais pour tout le monde).
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Ma conclusion est que si plus d’entre nous commencent à interagir avec une situation douloureuse et complexe sur la base de la Vérité (confortable ou pas ; simple ou complexe) et de la Charité (au sens noble du terme) pour tout être humain sans distinction, alors notre religion (pour les chrétiens, notre foi personnelle en Jésus-Christ) pourra nous aider à être des instruments de paix et de guérison. A mesure que nous glorifions ignorance, préjugés, paresse intellectuelle, et implicitement un dieu de préférences ethniques… je ne sais pas trop ce que nous apportons au monde que l’enfer lui-même ne déverse déjà en larges quantités sur notre planète. Et même s’il est l’objet de notre « sympathie », ce n’est pas ce dont notre prochain à besoin, qu’il soit israélien-juif, israélien-arabe, arabe-mulsulman, arabe-chrétien, arabe-juif, juif non israélien, juif ‘messianique’, israélien ou palestinien séculier, et dans toutes les configurations possibles…
Elrig
Elrig
* cf. Evangiles de Matthieu (chapitre 25 v. 35 et 36) ou de Luc (chapitre 4 v. 18 et 19)
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